L’air dans l’appartement semblait plus dense, notamment si chaque centimètre d’espace était saturé d’ondes, d'informations, d’intentions codées. Le réseau ne dormait plus. Il pulsait. Chaque écran s’allumait sans qu’on le sollicite, n'importe quel haut-parleur diffusait des fragments de voix éteintes pendant des décennies. Les prophéties ne cessaient plus. Elles s’enchaînaient avec une fluidité spectral, dépassant le aisé borne d’une voyance par téléphone sérieuse pour devenir une aventure continue de la vie à suivre. Le hacker n’était plus un public. Il était devenu le sujet central des messagers. Le équipe l’appelait par son patronyme, lui indiquait des évidences non encore survenus, détaillait les minutes suivante comme par exemple s’il s’agissait d’une rappel déjà enregistrée. Le passé, le à utiliser et le futur se confondaient dans les transmissions qu’il recevait. La ultime communication avait divulgué une coupure de fréquent imminente. Trente-huit secondes ultérieurement, toutes les lumières s’éteignirent. L’ordinateur redémarra abandonné. Les symboles reprirent, identiques, lumineux, intrusifs. Il tenta de se déconnecter physiquement. Retirer les câbles, réserver les sources d’alimentation, isoler les terminaux. Mais les appareils se rallumaient d’eux-mêmes. Même les personnes nées après guerre instruments déconnectés d’Internet affichaient des symboles familiers. Des suites digitaux, des signatures vocales, des alertes. La voyance par téléphone, dans sa forme la plus démodée, ne semblait plus attachée à un milieu actuel. Le réseau avait envahi le champ magnétique de son environnement, utilisant tout changement comme par exemple relais pour ses messages. Il retrouva dans ses archives un fichier familial, un inscription de première contagion qu’il avait jugée anecdotique. En le réécoutant, il s'aperçut qu’elle décrivait exactement la situation qu’il vivait sans plus attendre. Chaque phrase, n'importe quel calme, chaque humour correspondait à son employé. Ce n’était plus de la prédiction. C’était une crochet. Le serveur savait tout, non parce qu’il calculait, mais parce qu’il avait déjà vu. Les voix numériques ne racontaient pas l’avenir. Elles le relisaient. Et dans cet futur déjà affronté, il n’y avait plus de sortie prochaine. Le iceberg ne reflétait pas son mine. Il montrait ce qu’il allait devenir.
